Bauges 39-45

De 2003 à 2015, sous la direction du cinéaste Pierre Beccu, plusieurs démarches documentaires ont été réalisées sur le thème de la seconde guerre mondiale dans le massif des Bauges, avec à la clé un imposant travail de collectes de témoignages.

Le but du dispositif « Bauges 39-45  » est d’inventorier, de transmettre et de rendre accessible par les moyens actuels la totalité des témoignages enregistrés. Un ouvrage est en cours de préparation, ainsi qu’une exposition itinérante.

Les différentes phases :

« Trois résistants au Collège » – 2003 – 1 h 33
« Bauges 44, n’oublions pas » – 2006 – 27 personnes interrogées – 17 heures
« Contre le mur de ma maison » –  2009 – 12 personnes interrogées – 25 heures
« Ateliers complémentaires 2012-2013 » – 25 personnes interrogées – 20 heures

Toute l’opération est partie de l’intervention des trois résistants Marcel Roullet, René Chanel et Roger Copin devant les collégiens en 2003. Nous avons filmé l’échange dans l’esprit de transmettre le témoignage. A la fin, Marcel Roullet, résistant au maquis de Bornette, ancien enseignant et par ailleurs administrateur de la Cinémathèque des Pays de Savoie, a lancé un appel aux jeunes : « Parlez avec les anciens autour de vous, n’attendez pas ». Les professeurs d’histoire Hervé Vernin et Edouard Meillasson, les élèves et Pierre Beccu ont relevé le défi. Trois ans plus tard, « Bauges 44, n’oublions pas » était montré au public et sortait en dvd.

Extrait « Résistants au Collège » – 14/01/2003 – 1 h 33 min, avec Marcel Roullet, René Chanel, Roger Copin

« Bauges 44, n’oublions pas » documentaire témoignages — 1h 35 min

A l’initiative des professeurs d’histoire-géographie du Collège, en partenariat avec le Centre Social les Amis des Bauges et l’Association Oxalis, les jeunes de 3ème ont réalisé un véritable travail de préservation de la mémoire collective sur les évènements survenus dans le massif des Bauges en 1944.

Après un long travail préparatoire, les élèves ont collecté groupe par groupe la mémoire des témoins directs. Ils ont progressivement acquis l’autonomie sur le tournage, aidés par les parents et quelques bénévoles. Le montage avec les élèves s’est déroulé sur deux unités pendant les vacances de Pâques. Les finitions ont eu lieu au Collège avec la participation constante des élèves. Il s’agissait de traiter d’une manière précise des faits historiques importants. Cela imposait une durée finale élevée (1 h 35) et un fort recours aux témoignages, rythmés par quelques extérieurs, archives ou positionnement des élèves eux-mêmes à travers la musique du film.

Le montage du projet, l’organisation de l’atelier hors temps scolaire, et les conditions de diffusion ont été assurés par Catherine Calonne, de l’association les Amis des Bauges. Les parents ont été sollicités pour participer aux ateliers.

Avec l’aide de la Région Rhône-Alpes, du Conseil Général de la Savoie, de la DRAC et du Souvenir Français.

Un extrait de « Bauges 44, n’oublions pas », réalisé par les trois classes de 3ème du Collège des Bauges en 2006.


Parent d’élèves, Isabelle Dupérier a participé à l’atelier en tant que bénévole, et a souhaité poursuivre l’expérience sur un aspect qui la touchait de très près.

Contre le mur de la maison d’Isabelle, deux hommes ont été fusillés. C’était en 1944, ils étaient juifs. Les nazis les ont abattus froidement, et ont déporté leur famille à Auschwitz. Après de nombreuses recherches, Isabelle a retrouvé à Marseille les deux rescapées de cette famille. Simone et Lison avaient alors 14 et 17 ans. Elles ont survécu aux camps et ont tenté de refaire leur vie. 66 ans plus tard, avec Isabelle et ses filles, elles refont le chemin.

La parole à Isabelle : « Je suis originaire du Nord de la Fance, et lorsque je me suis installée en Savoie, dans le hameau d’origine de mon mari, les anciens m’ont raconté l’histoire des deux juifs fusillés contre le mur de ma maison. Peu de détails, encore moins d ‘explications ni de circonstances précises, juste ce fait froid et sombre, avec l’image du sang qui coule dans la ruelle. Et puis ce détail, presque insignifiant pour mes voisins : les deux petites filles ont survécu aux camps. Elles ont été aperçues plusieurs fois au cimetière, sur la tombe de leur papa, mais ne sont jamais revenues au hameau. Personne ne sait si elles vivent encore, ni ce qu’elles sont devenues. Pour lutter contre l’image atroce de qui s’est passé à l’endroit où j’ai construit ma vie, je me suis accroché à l’espoir de retrouver les petites filles. Mais sans réel espoir d’y parvenir. Il a fallu un chèque déposé dans un restaurant de la vallée, où j’ai pu relever un nom. J’ai retrouvé Lison et Simone à Marseille il y a deux ans. Ce qui est incroyable, c’est qu’elles semblaient m’attendre. »

Extrait « Contre le mur de ma maison »montage de 1 h 25 – 2009 – 12 témoins – 25 heures de témoignages

Les deux films terminés, il s’agissait de ne pas laisser de côté toute la matière non sélectionnée au montage. La rendre disponible pour maintenant et pour plus tard, dans l’esprit du respect de la parole intégrale des témoins et du travail des jeunes ou des parents par qui s’est opérée la transmission.

A partir de 2011, Pierre Beccu a sollicité la Communauté de Communes du cœur des Bauges pour la mise en place d’un programme de collectes complémentaires, ainsi qu’un dispositif d’inventaire et de transmission du travail accompli sous la forme d’une base de données multimédia, précédant l’édition d’un ouvrage et la réalisation d’une exposition multimédia. L’historien Eric le Normand apporte son concours en supervisant et signant la partie historique de l’ouvrage.

Les phases 1 et 2 ont permis de collecter, inventorier, numériser 42 heures de témoignages réalisés de 2003 à 2012. Le réalisateur Pierre Beccu et l’historien Eric le Normand ont travaillé la matière pour réaliser une bonne partie de l’ouvrage à paraître qui contiendra deux entrées : histoire pour « un massif à l’épreuve de la guerre », et récit de la transmission pour « un massif à l’exercice de la mémoire ».

La phase 3 correspond à l’entrée dans le dispositif du Parc Naturel Régional du massif des Bauges, et à l’extension des collectes de témoignages sur la partie Haute-Savoie du massif, les deux parties ayant joué un grand rôle dans la libération des villes de la Région en 1944. Suivront également dans l’année à venir le bouclage de la base de données complète et la médiation de l’opération à travers l’ouvrage coffret dvd et une expositon itinérante.

La réalisation du projet est à l’échelle de la Région, et le public visé par les actions est régional et national par l’intermédiaire de l’édition et des réseaux CRDP.

 

Un extrait de l’enregistrement – sans montage – des témoignages d’Albert Pricaz, Emile David et Maurice Brunier, tous trois résistants passifs, puis actifs. Bellecombe-en-Bauges – 2006. Ces trois personnes sont maintenant décédées.
Ce sont les élèves qui filment, enregistrent le son et posent les questions. L’adulte que l’on entend parfois est Hervé Vernin, professeur d’histoire et habitant de la commune. Pierre Beccu est également originaire de la commune.

 

La mise en place des ateliers complémentaires vient clore la collecte de témoignages. Le traitement des données prépare la médiation au public et aux jeunes générations. Objectifs :
– diffuser la synthèse historique et l’expérience patrimoniale au public et aux acteurs de terrain qui souhaiteraient oeuvrer sur cette thématique,
– permettre l’accès pour la recherche ou pour la population à la totalité de la matière collectée.

Projet en collaboration avec la Communauté de Communes du coeur des Bauges, le Collège des Bauges, les Amis des Bauges, le Conseil Général de la Savoie, la Région Rhône-Alpes, la DRAC Rhône-Alpes, le PNR du Massif des Bauges, le Souvenir Français.

 

Le livre-dvd « De l’épreuve de la guerre à l’exercice citoyen » est sorti en 2015, à l’occasion du 70ème anniversaire de la libération.
Pour en savoir plus sur l’ouvrage : ici

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